Et si on parlait… beau ou bon livre ? 🤔

Et si on parlait...

Bonjour 😄 Aujourd’hui, un article que j’aurais préféré ne jamais écrire, mais voilà quelques semaines (voire mois) que je vois passer des commentaires, des réflexions, des publications sur le sujet, et je ne peux plus me taire. Alors… Si on parlait « beau » ou « bon » livre ? 🤔

Tout a commencé avec un reel sur le compte Instagram des éditions Hugo, et en particulier leur collection Hugo New Romance. Dans cette courte vidéo publiée le 8 août, donc en plein été (c’est important de le souligner), la maison d’édition annonce la prochaine traduction du roman bestseller de Rebecca Yarros : « Forth Wing », et sa sortie prévue en février 2024.
Fourth wing - Rebecca YarrosAu lieu de se réjouir de la nouvelle, un grand nombre de personnes ont laissé des commentaires pour, au mieux, faire part de leur désarroi sur la maison d’édition qui a acquis les droits de traduction, et au pire, sur la qualité présumée de la version française du roman – non pas pour la traduction, mais pour le livre en tant qu’objet ! 🙄 La « qualité » du reel et de l’annonce ont bien évidemment été jugés également comme étant, en gros, « bas de gamme ». Nous étions, je le rappelle, en plein été, avec très certainement une équipe réduite. Ces personnes y ont-elles pensé ne serait-ce qu’une seconde ? Ça m’étonnerait…

On a ainsi pu lire, par exemple : « vous ne voulez pas donner les droits à De Saxus ? » (comme si De Saxus était une référence en termes de traduction… 🙄), « oh non ! Le livre va être trop moche ! » (nous avons apparemment des voyants extralucides dans les commentaires puisque nous n’avons encore pas de visuel sur la version française… 🙄), ou encore « vous avez intérêt à sortir un beau relié ! » (sinon quoi ?… 🙄).

Et j’en passe… énormément… Ma « préférence » irait presque à cette injonction « vous avez intérêt de »… Pour qui se prennent ces personnes qui se permettent de donner des ordres à des professionnels de l’édition, quand eux-mêmes ne sont que des lecteurs ? 😤 Je suis d’accord qu’en tant que consommateurs, nous avons un droit de regard et de parole sur ce que nous… consommons. Mais est-ce une raison pour se montrer irrespectueux ? Non.

Évidemment, ce genre de commentaire n’a pas été laissé par 1 ou 2 personnes, mais par des dizaines et des dizaines, qui se plaignaient de la médiocrité supposée d’un objet-livre très loin d’être finalisé ! J’ai déjà trouvé ça ridicule. Quitte à pleurer sur une édition qui ne nous plaît pas, autant attendre qu’elle soit, au minimum, montrée, non ? Nous n’avons actuellement aucune idée de ce que la maison d’édition prévoit (relié ou non, jaspage ou non, etc.). Ces commentaires sont, au mieux, puériles… Et puis, j’aimerais comprendre : quel est l’intérêt, quand de nombreuses autres personnes se sont déjà plaintes, d’en rajouter une couche ? Besoin de se mettre en avant ? Personnellement, si je n’aime pas une couverture de livre, je ne vais pas m’amuser à le dire, et si je dois le faire, j’essaie de me montrer respectueuse et de ne pas oublier de préciser que c’est un avis très personnel, tout comme dans mes (rares) chroniques pas très positives. Il semble donc que certaines personnes aient besoin de se montrer virulentes, voire violentes, dans leurs propos pour se sentir importantes… Bref 🙄

Avec tout ça, j’avais déjà l’idée de cet article, mais j’hésitais encore à l’écrire. Et puis, PKJ a annoncé une réédition collector de la trilogie « Hunger Games », à l’occasion de la sortie du film basé sur le préquel (« La ballade du serpent et de l’oiseau chanteur », qui sortira en version poche également à la même date). Et là, c’est reparti pour un tour ! 🙄
Hunger Games - édition collector PKJ (visuel Instagram)Alors évidemment, pas de réflexions sur la traduction. Non, « on » connaît déjà, donc « on » s’en fiche certainement (enfin, encore plus que d’habitude)… Par contre, bonjour le tollé sur les choix des couvertures !

« C’est une blague ? », « c’est les couvertures australiennes de 2012 ! » (oui, et ? Comme si d’autres maisons d’édition ne reprenaient pas les couvertures originales, collector ou non…), « je m’attendais à tellement mieux » (et donc à quoi, en fait ?…), « elles sont où les illustrations des pages de garde ? Et le jaspage ? » (vu que le visuel montre des romans fermés, qui a dit qu’il n’y aurait pas d’illustrations ? Et s’il n’y en a pas, ça empêchera de lire le livre ? Et enfin pour info, le jaspage est présent : en couleurs métallisées, comme sur les couvertures, c’est précisé dans le texte, encore faut-il le lire…), ou encore « c’est tellement hideux » (tout comme l’orthographe dudit commentaire, en passant…). Sans oublier les plaintes sur le prix d’un tome, qui sera à 25 euros. Pour un relié, rien de bien surprenant, vu que c’est le tarif habituel, à peu de choses près… Une envie de râler pour rien, peut-être ? Et puis bon, ok, ça fera 75 euros au total pour la trilogie, mais qui a dit qu’il fallait absolument acheter les 3 tomes d’un coup ? 🤔 

J’ai halluciné devant tant de virulence, et je n’ai apparemment pas tout vu. Il semblerait que ce genre de commentaires se multiplie sur les réseaux depuis un moment. Ça ne me manquait pas, c’est clair… « Bookstagram » était un endroit relativement respectueux (il y a toujours des exceptions). Aujourd’hui, cette tendance des « rageux » à s’exprimer tant malheureusement à prendre de l’ampleur. Évidemment, il y a toujours des mécontents, comme partout, mais jusqu’à il y a peu, ils étaient relativement silencieux (ou en tout cas moins nombreux à s’exprimer). Aujourd’hui, on voit un total manque de respect des autres, de leur travail et de leurs opinions. Franchement, la vie est déjà bien assez compliquée sans en rajouter, non ?

Et au-delà d’un très gros problème de respect (ou plutôt de non respect) des autres et de leur travail, ça met clairement en avant la superficialité galopante de certains « lecteurs » plus consommateurs que réellement passionnés de livres et de lectures. Parce qu’en effet, me permettant moi-même quelques réponses à certains commentaires, je me suis pris des « si tes bibliothèques sont moches, ça te regarde ». Parce que c’est la beauté des bibliothèques qui importe ? Sérieusement ? 🙄

Depuis un certain temps, on voit fleurir les éditions « collector » de tous les côtés, avec jaquettes et jaspages à paillettes (j’exagère à peine !). Et comme tout le monde, j’apprécie les beaux objets, et les beaux livres bien entendu. Mais ce qui m’intéresse de prime abord, c’est le CONTENU, pas le côté « oh c’est joli » d’un livre sans intérêt, avec une histoire mal écrite / mal traduite !

Toutefois, quand je vois ces commentaires qui mettent l’accent sur l’objet, je m’interroge 🤔 Qu’est-ce qui est le plus important : une belle bibliothèque, toute colorée, avec des jaspages dans tous les coins, à exhiber sur les réseaux ou sur YouTube alors que la plupart des livres ne seront même pas lus ? (Attention, une belle bibliothèque colorée, c’est très bien ! Du moment que les livres sont là parce qu’ils ont été appréciés, et pas uniquement parce qu’ils sont beaux !) Ou alors, une bibliothèque peut-être moins « belle » (et la beauté, c’est totalement subjectif, faut-il le rappeler ?) mais remplie de livres qui ont été lus et aimés ? 🤷‍♀️

Personnellement, mes bibliothèques sont pleines de livres de toutes tailles, de tous formats, en poche, en broché, en relié, en français, en anglais, avec des dos cassés et des couvertures cornées ou d’autres que j’ai réussi à garder comme neufs même après lecture… Mais surtout, mes bibliothèques sont remplies de livres que j’ai AIMÉS, qui m’ont procuré du plaisir, des émotions, qui me « parlent » encore aujourd’hui alors qu’ils ont été lus depuis longtemps ! J’ai même un roman de Stephen King en italien, alors que je ne lis pas l’italien, et certains romans que j’ai particulièrement aimés dans plusieurs éditions différentes ! J’aime les livres, certains plus que d’autres. J’aime les regarder, les toucher en passant, me remémorer ce qu’ils m’ont fait ressentir quand je les ai lus. Ils font simplement partie de moi 🙏🏻

Mes bibliothèques parlent de moi, de mes goûts, et me ressemblent. Elles sont hétéroclites et bien remplies de livres qui ont… une histoire. Mes bibliothèques sont remplies de livres beaux et bons, des romans que j’ai aimés, et quand je les regarde, je ne vois pas que des beaux objets, mais des belles histoires, qui m’ont procuré des émotions. Se contenter d’un « beau » livre, c’est comme se contenter d’une belle assiette de restaurant gastronomique : c’est certes joli à regarder, mais ça ne remplit pas l’estomac pour autant.

Une bibliothèque remplie de « beaux » livres, lus ou non, qui ont été achetés parce qu’ils sont beaux (et pas parce qu’ils seraient bons) est, pour moi, totalement inutile et superficielle. Elle ne remplit pas son office. Autant y mettre des boîtes vides en forme de livres, ça reviendrait au même. Et d’ailleurs, ce n’est pas nouveau : à une certaine époque, quand les livres étaient peu accessibles (pour des questions de prix ou d’éducation), certains remplissaient leurs rayonnages d’ouvrages qu’ils n’avaient pas même ouverts, juste pour « faire genre » devant leurs invités. Les moins riches faisaient la même chose avec des boîtes, voire des façades entières, pour faire illusion…

Et à force de ne regarder que l’objet, certains en oublient qu’un livre c’est avant tout un texte. Il n’est pas là juste pour faire joli dans la bibliothèque !

Alors quand je vois ces commentaires, je m’interroge. Que sont ces personnes ? Des lecteurs et lectrices ? Certainement pas. Ce sont des consommateurs de superficiel, qui se laissent hypnotiser par une jolie couverture, un jaspage travaillé, mais qui, au final, ne seront peut-être même pas capables de dire de quoi parlent leurs livres, ou s’ils les lisent, se trouveront peut-être déçus d’avoir mis 25 ou 30 euros dans un roman parce que c’était un « collector »… 

Je ne les fustige pas de se laisser tenter, je suis moi aussi attirée par ces belles couvertures. C’est toujours un plaisir d’avoir un beau livre en main, et j’en ai évidemment quelques uns. Pour autant, je les sélectionne soigneusement, sans me jeter sur tous les collectors qui passent (et j’en ai vu le faire…). J’ai d’ailleurs tendance à me méfier de plus en plus des éditions trop travaillées. D’expérience, certains livres sont visuellement très très beaux, mais les avis des quelques lecteurs sont souvent plutôt voire très mitigés. À se demander si on ne cacherait pas la médiocrité du récit dans un bel emballage…

Peut-être que mon article vous aura froissé, et je m’en excuse. Sauf si vous faites partie de ces acharnés du combo jaspage/relié. Dans ce cas, vous avez mon avis, c’est le mien, qu’il vous plaise ou non…

La grande question, finalement, c’est : que préférons-nous, un beau livre ou un bon livre ? Bien sûr, dans l’idéal, un beau et bon livre, c’est encore mieux 😜