Et si on parlait… éditions limitées et marketing 🤑

Et si on parlait... Éditions limitées & marketing

Tout récemment, j’ai proposé un article sur la différence entre les livres reliés et les collectors (disponible ici). J’y avais rapidement abordé la question des éditions limitées, il est temps de se tourner vers le sujet 👀

Comme je le disais donc dans cet article sur les « reliés collectors », on voit parfois la mention « édition limitée ». Mais qu’est-ce que ça veut dire ?

Et bien c’est tout simple : un livre en édition limitée ne sera publié qu’à un certain nombre d’exemplaires, et pas davantage. Il est malheureusement souvent difficile de savoir s’il s’agit d’une réelle édition limitée puisque pour connaître le nombre exact de livres disponibles, il faudrait qu’ils soient numérotés. Par exemple, le coffret des 4 tomes de « La Passe-Miroir » de Christelle Dabos, qui n’existe qu’en 7 000 exemplaires numérotés. Là, pas de doute, c’est bel et bien une édition limitée 😄

Et donc, lorsqu’il est fait mention d’une « édition limitée » (voire en « relié collector »), de quoi parle-t-on réellement ?

Concernant les ouvrages des éditions De Saxus, qui ont très largement inspiré cet article, ils ont cessé depuis un moment d’indiquer « en édition limitée » sur leurs publications Instagram « normales », comme ça a pu être le cas à une période, à part récemment pour le « coffret » du roman « Babel » de R.F. Kuang sorti en fin d’année 2023. L’édition en « coffret » est même indiquée comme « édition collector limitée à tirage unique » sur une des publications de la maison d’édition, encore une fois sans indication du nombre d’exemplaires disponibles. 

Ce qui me dérange dans l’appellation « relié collector », c’est que cela induit l’idée que les livres sont également en édition limitée. Inconsciemment, nous imaginons qu’une édition « collector » aura davantage de valeur, et donc sera moins disponible, puisque c’est bien connu : « tout ce qui est rare est cher ». Ainsi, quand on a une telle édition en mains, on se sent presque chanceux…

Gardons l’exemple, très parlant, de cette maison d’édition. Leurs reliés sont en effet limités, sauf que nous, consommateurs potentiels, n’avons aucune idée du nombre exact de livres qui seront mis en vente. Tout ce que nous savons, c’est qu’à un moment, les versions reliées seront introuvables en librairie ou sur les plateformes de vente en ligne. On verra ensuite fleurir les reliés « collectors » mis en vente en occasion à des prix proprement exorbitants et ridicules 🙄

Comme je le disais dans mon article sur les « reliés collectors », c’est donc surtout une question de marketing. Quand on sait que les versions reliées sont « limitées » (et souvent bien jolies, même si personnellement je trouve que la qualité des ouvrages a baissé depuis quelques années…), que si on ne se jette pas dessus rapidement on ne pourra plus se permettre de les acheter par la suite, on ne se pose pas de questions et on achète la version reliée « collector » (et on est content avec notre « beau livre » pas forcément bon, mais ce sujet a été abordé dans un autre article) 🙄

Cette maison d’édition était connue pour ça : quand le relié n’est plus en vente, c’est trop tard, il faut se « contenter » du broché. Mais ça, c’était valable jusqu’à ce qu’ils proposent des rééditions reliées ! Ce qui a beaucoup fait réagir.

En effet, celles et ceux qui n’avaient pas pu se procurer les ouvrages réédités en relié à leur sortie s’était tournés vers les brochés. La question se posait alors de racheter ou non un roman déjà lu (ou pas) pour avoir la « jolie édition reliée ». Marketing, quand tu nous tiens… 🙄

Les plus « énervés » sont celles et ceux qui avaient acheté une version « collector » en occasion, à des prix encore une fois exorbitants, persuadés qu’iels étaient que c’était le seul moyen d’avoir cette édition dans leur bibliothèque. Parce que, encore une fois, cette notion de « collector » et le fait que les ouvrages ne soient à un moment plus disponibles donnait à ces livres une aura particulière.

Celles et ceux qui s’étaient procuré les éditions « reliées collectors » à leur sortie ne sont pas en reste… Qu’en est-il de cette notion de « collector » quand l’ouvrage est réédité 2, 3, 4 ans après sa sortie initiale, sachant que qui dit « collector » dit, inconsciemment, limité et donc une valeur plus importante ? Les premières éditions « reliées collectors » perdent-elles en valeur ? LEUR édition a-t-elle d’un coup perdu de sa valeur ? (Ah ! La spéculation… 🙄)

Ainsi, l’édition reliée d’origine de la saga « Nevernight » s’est vendue à environ 200 euros le tome sur les sites de revente type Vinted ! Et De Saxus a finalement réédité toute la saga, en édition « collector » avec jaspage et jaquette différente ! Autant dire que ça n’a pas plu à tout le monde. Mais nul doute que le marketing a fonctionné : nombre d’éditions ont à coup sûr été vendues dès leur sortie…

On a vu la même chose avec « Le Prieuré de l’Oranger » de Samantha Shannon, initialement publié en relié en 2019, puis réédité en 2023 avec un jaspage orange simple, à l’occasion de la sortie du préquel « Un jour de nuit tombée« , quand la première édition était plus classique avec ses pages blanches… C’est vrai, je me suis procuré les 2 tomes dans cette édition. Mais c’est la dernière fois que j’ai dépensé mon argent pour cette maison d’édition.

La même pour « La mer au milieu de la mer céruléenne » de T.J. Klune, qui est ressorti en 2023 avec sa couverture originale (donc celle du roman en VO) et un jaspage travaillé, quand une précédente édition était sortie en 2021, plus simple, certes, mais tout de même…

On va arrêter avec cette maison d’édition, j’en ai suffisamment parlé. Si vous ne l’avez pas encore compris, je ne suis pas une grande fan de leurs pratiques et de leurs techniques de vente que je trouve un peu… agressives, à coup de multiplication de posts Instagram… Ils sont d’ailleurs un peu responsables de ma décision de davantage lire en anglais 😅

Loin de moi l’idée de tenter de vous convaincre de ne plus acheter leurs ouvrages ! Chacun fait ce qu’il veut de son argent 😜

Pour en revenir au sujet d’origine de cet article : il faut bien garder à l’esprit qu’il y a une grande différence entre une édition réellement limitée, et donc publiée à un nombre précis d’exemplaires, numérotés, et une édition « limitée » vendue à X milliers d’exemplaires ! C’est souvent une technique de marketing sans réelle justification.

Je conclurai en vous donnant ce petit conseil : surtout, ne vous endettez pas pour un livre ! Ne dépensez pas des centaines d’euros pour un livre ! Ce n’est qu’un livre ! Car comme je le disais dans mon article « Beau ou bon livre », l’essentiel est surtout dans les pages, même si une jolie couverture, une vraie édition limitée, ça fait toujours plaisir 😄